Lors de sa recherche de tous les hommes de mains de Moriarty, Sherlock savait que ça risquait d'être difficile, long et surtout pénible. C'est ancré dans sa tête le fait qu'il doit tous les faire taire, tous les éliminer d'une certaine manière. La mission, il se l'est donné à lui-même dans le but de protéger ceux qu'il apprécie, Mrs Hudson, Lestrade et John. Le fait de garder son colocataire en dehors de tout ça c'est pour son bien, il pense beaucoup à son bien en ce moment, un peu trop d'ailleurs, mais ce n'est pas grave, il y réfléchira plus tard à cela. En ce moment ce qui l'importe c'est la recherches qu'il continue de faire sur les hommes à éliminer. Il pensait que tout était bouclé, qu'il ne restait plus que Moran, lorsqu'il est tombé sur un nouveau nom, en lien avec tous ceux avec qui il a eu affaire jusqu'à présent. Un oubli de sa part ? Non, mais surtout un homme qui s'est bien caché, qui a rapidement quitté le pays afin de se protéger un maximum pour ne pas avoir de problèmes. C'est futé de sa part, mais Sherlock n'a pas dit son dernier mot. Il se doit d'aller s'occuper de lui, même si l'envie de le laisser dans son coin lui a traversé l'esprit. Mais on ne sait jamais, il peut faire des choses qui peuvent lui causer des problèmes. Il suffit qu'il se croit en sécurité et qu'il tente quelque chose après, on ne sait jamais ce qu'il peut se passer et Sherlock ne veut pas prendre le risque de le laisser agir et de tuer quelqu'un, parce que c'est son boulot, il doit bosser avec Moran donc il doit avoir des ordres et Moran ne doit pas savoir que Sherlock est sur sa piste. Pour Sherlock, Moran sera le plus difficile à avoir et peut-être, même certainement qu'il aura besoin de John pour s'en occuper, il ne doit pas le mettre trop longtemps à l'écart de toute cette affaire, il doit comprendre qui est cet homme et ce qu'il essaye de faire. C'était le bras droit de Moriarty, il ne doit pas être si bête que cela et il ne l'est absolument pas. Cet homme est dangereux et il doit être stoppé le plus rapidement possible, mais pour le moment, Sherlock ne sait pas ou se trouve cet homme, il perd sa trace, à chaque fois, ce qui montre qu'il reste quelqu'un de futé, et qu'il efface ses traces. Le détective se demande constamment ce qu'il fait, ou bien ce qu'il est en train de préparer, parce qu'il ne doit pas rester comme ça les bras croisés. Ils ne pourront pas indéfiniment jouer au jeu du chat et à la souris, un jour ça finira par éclater et là les choses changeront, il y aura des problèmes et l'un d'eux devra donner sa peau pour permettre à l'autre de rester en vie. Sherlock attend cette confrontation avec plaisir, il ne s'attend à trouver quelqu'un de fort, peut-être pas autant que Moriarty, il espère ne pas être déçu, c'est tout, si c'est le cas... Nous verrons bien.

Le détective fourre quelques affaires dans un sac de voyage noir, surtout de quoi ne pas mourir de froid, il s'en va avec Hayden à la recherche du dernier homme de mains de Moran. La question qu'on peut se poser c'est pourquoi Hayden, c'est simple. Lorsque Sherlock était au yard il y a quelques jours, il demandait à Lestrade si il ne connaissait pas quelqu'un qui pouvait lui servir de traducteur, Sherlock a beau parler un nombre impressionnant de langage, il ne connaît pas l'Ukrainien, du coup, il fallait qu'il trouve quelqu'un. Sherlock n'avait pas envie de se taper une nouvelle langue à apprendre en quelques jours, c'est certainement assez, mais il allait devoir s'enfermer et ne rien faire d'autre que cela, hors l'affaire en cours lui prenait déjà pas mal de temps, d'autant plus qu'il reprend ses expériences sur les membres et autres organes humain, travaillant sur la décomposition avec l'aide de produits chimiques. Bref, Hayden est arrivée et elle s'est présentée. Sherlock la connaît c'est une amie de John, il court la rejoindre lorsqu'elle l’appelle les nuits, oui Sherlock a fait le lien entre les deux mais pour le moment, il garde cela pour lui, il en parlera quand le moment sera propice, il doit d'abord en discuter avec Hayden, parce qu'il se pose des questions sur la jeune femme, rien de bien concret pour le moment, mais des connexions se font dans sa tête même si il a besoin de plus de données. C'est le moment ou jamais de mettre les choses au clair avec elle. Rapidement, il a choisit une date, un week-end plus précisément, il ne lui a pas laissé le choix, elle devait venir un point c'est tout. Bref, Sherlock ferme son sac et le prend dans ses mains, le déposant dans la cuisine, ici, il prend un petit papier qu'il colle sur le frigo, laissant ainsi un message à John, sa façon à lui de lui dire de passer un bon week-end, parce qu'il ne va jamais le dire à voix haute, surtout en sachant qu'il va passer son week-end avec l'autre numéro un, Mary. C'est affreux ce qu'il peut détester cette femme, même si elle n'a rien fait contre lui, elle ne le déteste pas, enfin, elle devrait. Sherlock colle son papier sur le frigo. « Ne touche pas à ce qu'il y a dans le frigo avant mon retour. » Rien de plus, il sait que John va revenir avant lui de son week-end, étant donné que Sherlock doit reprendre l'avion et que pour le moment, il n'a que la date de départ, il n'a pas assez pour dire quand est-ce qu'il va revenir, tout va dépendre de ce qu'il va se passer là-haut. Reprenant son sac, Sherlock envoie un message à Hayden lui donnant rendez-vous à l'aéroport dans une heure, qu'ils discutent un peu avant de s'en aller.

Ce qui est étrangement bien avec cette jeune femme c'est qu'elle ne pose guère de questions bien qu'elle se doute de ce qu'il va se passer, elle pourrait vouloir tout savoir, mais durant tout le vol après le changement d'avion etc, elle n'a pas essayé de le questionner un seul instant. Elle est restée là, respectant Sherlock, le Sherlock un peu anxieux sur ce qu'il va se produire, non pas qu'il a peur, mais la démarche est plutôt hasardeuse, il ne sait pas comment il va réussir à s'occuper de cet homme, Henry Marchall, il travaille en tant que guide dans la ville fantôme de Pripiat depuis quelques mois seulement, il n'a pas réussi à connaître les jours ou il devait travailler là-haut ni exactement ce qu'il y faisait, mais le seul moyen et de s'occuper de lui dans la nuit. C'est un choix excellent, certainement une idée de Moran de l'envoyer là-haut. Bref, tout se passe pour le mieux pour le tandem de choc. Ils s'installent dans un hôtel près de la ville fantôme dans une même chambre, bien entendu qu'il n'allait en rester qu'une, c'est évident. Enfin ce n'est pas ce qui agace le plus Sherlock, lui c'est plus le fait de ne pas comprendre ce que les gens disent autour de lui et Hayden ne va pas non plus tout lui traduire, c'est évident. Il jette sur son sac sur le lit et s'affale élégamment sur le fauteuil, l'unique de cette miteuse chambre d’hôtel. « J'aimerai que nous discutions un instant Hayden. » Dit-il en joignant ses mains sous son menton comme il a l'habitude de le faire. « Au sujet de ce que nous allons faire ici et d'autres choses... » le ton de Sherlock est calme et posé. Elle va comprendre, elle est loin d'être idiote cette jeune femme, surtout si elle est ce qu'il pense qu'elle est, idiote ne serait pas le mot qui conviendrait le plus pour la décrire.

I knew that I forgot someone


There once lived in me a great fire,
But it's been cooled by overwhelmed desire.
There's a crater but it's just bone deep,
And it deepens every time I sleep.

lle regardait les bris de verre sur le sol. Elle cligna des yeux, comme l’objectif d’un appareil photo qui se fermait l’espace d’un instant. Et dans son esprit, c’était tout comme. La scène restera à jamais figée dans sa mémoire, aussi précise et vivace que si elle venait de se passer. Elle se pencha et commença à ramasser un à un les morceaux de verre avec précaution. Elle savait que si elle les observait tour à tour, elle serait capable de reconstituer le tube à essai qu’elle venait de briser sans scrupule. Peut-être était-ce pour cela qu’elle s’appliqua à ne pas trop les observer, se contentant de les fourrer en désordre dans un pot en plastique. Il y avait quelque chose de dérangeant dans sa mémoire, cette capacité buguée de se souvenir de chaque détail, chaque seconde de sa vie. Une petite voix qui lui soufflait que parfois, il fallait savoir tourner la page.

D’un mouvement ferme, elle versa les débris dans la poubelle. Tourner la page, oublier, pardonner, tout cela ne faisait pas parti de son vocabulaire. Avec un soupire, elle se pencha sur sa table de travail et attrapa un nouveau tube à essai pour continuer ses expériences. Le LSD dans sa poche semblait peser une tonne. Elle mourrait d’envie de le sortir, d’en extraire sa dose et de le modifier pour pouvoir le mettre dans une seringue, qui lui aurait troué sans merci la peau et les veines pour injecter le tout dans son sang. Quelques heures sans penser, quelques heures sans que sa mémoire n’enregistre chaque détail de son existence. Seulement, il n’en était pas question pour le moment. Elle avait un avion à prendre dans quelques heures et si elle avait suffisamment l’habitude de la drogue pour donner le change aux autres lorsqu’elle était sous stupéfiant, elle n’était pas douée au point de duper Sherlock Holmes – ni assez stupide pour le penser.

Son portable se mit à vibrer dans sa poche, lui indiquant un nouveau message. Elle l’ignora un moment, préférant terminer sa solution létale. Cela faisait plusieurs semaines qu’elle travaillait dessus, et il lui avait fallu toutes ses connaissances en chimie et en médecine pour réussir à stabiliser le composée. Une substance qui causait la mort et qui ne laissait aucune trace médico-légale derrière elle. Elle en était assez fière, elle voulait bien l’avouer. A condition de bien camoufler le tout et de ne pas laisser la moindre trace de piqure, elle pourrait s’en servir sans risque les jours prochains. Quelques minutes plus tard, elle extrayait son téléphone de sa poche. Elle esquissa un sourire, Sherlock lui fixant un rendez-vous à l’aéroport pas plus tard que dans une heure. Heureusement qu’elle habitait tout près et qu’elle avait déjà préparé ses affaires... Elle ne connaissait pas personnellement Sherlock, mais John était son meilleur ami et il lui avait suffisamment parlé de lui pour qu’elle connaisse un peu le bonhomme... et aussi ce qu’il fallait éviter de faire en sa présence.

Elle n’aurait jamais cru que l’ukrainien lui servirait un jour. Apprendre une langue était un jeu d’enfant pour elle, elle n’avait qu’à lire deux ou trois bouquins et elle n’avait plus qu’à s’entraîner à la prononciation. Quitte à avoir une mémoire parfaite, autant la remplir avec des choses intéressantes non ? Les langues étrangères lui servaient surtout pour lire ses livres en version originale, ne supportant pas vraiment les traductions. Hayden avait tendance à être assez perfectionniste. Elle ôta ses gants en plastique et sa blouse, décidant de prendre une douche et de se changer totalement avant de partir. La demoiselle était prudente et tant qu’elle ne savait pas exactement ce que Sherlock en avait déduit de son amitié avec John, elle préférait ne pas prendre de risque. De toute façon, les substances qu’elle pouvait manipuler chez elle étaient les mêmes qu’à son boulot, d’éventuelles tâches ne seraient pas suspectes...

Une quinzaine de minutes plus tard, elle fermait sa maison à double tour et enclenchait l’alarme avant de sauter dans un taxi. Elle possédait sa propre voiture, et une moto aussi, mais elle ne voulait pas s’encombrer l’esprit avec le parking, d’autant plus qu’elle ne savait pas combien de temps elle allait rester en Ukraine... On n’était jamais sûr de rien avec Sherlock après tout. Le voyage se passa sans encombre, le détective gardant le silence et Hayden ne cherchant pas à le déranger le moins du monde. Cela l’arrangeait au fond, ainsi elle ne risquait pas de se trahir et son cerveau avait moins d’information à enregistrer. La majeure partie de son attention était consacrée à l’homme assise à côté d’elle, notant ses réactions, apprenant les tics de son visage. Elle voulait le gêner le moins possible. Avec lui, il valait mieux réagir qu’agir... lui laisser l’initiative en somme. Elle n’était même pas tout à fait sûre de pourquoi ils étaient là. Elle savait qu’elle devait servir d’interprète, mais à part ça...

Les choses changèrent un peu plus en Ukraine. A Londres, Sherlock pouvait agir en totale autonomie, ici il était dépendant de la traduction que lui faisait la scientifique. Elle le laissa donner des ordres, lui servant de guide. Elle avait regardé la carte de la ville et quelques secondes lui avait suffi pour la « photographier » et la mémoriser entièrement. Maintenant, ils ne pouvaient plus se perdre – sauf si la carte était fausse bien sûr. Au départ, elle se contenta de lui traduire ce qu’il lui demandait. Puis, tâchant de cibler un peu plus ce qui était susceptible de l’intéresser ou non, elle tenta de lui soumettre plusieurs informations sur la ville qu’elle entendait et qu’il ne pouvait pas inventer. Se référant aux réactions de son visage – le léger tic de sa joue, le léger haussement de son sourcil gauche, le petit pincement de ses lèvres – elle apprit à lui transmettre ce qui l’intéressait de ce qui n’était pas important, ce qui était pertinent de ce qui ne l’était pas.

Un autre avantage de sa mémoire, même si elle ne lui transmettait pas les informations en direct, il pouvait toujours lui poser des questions sur ce qu’elle avait entendu des jours après et elle était capable de lui retranscrire mot pour mot la conversation. Ils échouèrent bientôt dans un petit hôtel où ils partagèrent une chambre – non, sérieusement ? – et elle eut à peine le temps de déposer ses affaires avec un peu plus de délicatesse que son compagnon que déjà, il s’écroulait dans un fauteuil.

SHERLOCK ―

« J’aimerai que nous discutions un instant Hayden. »

Oh oh. Les moins jointes sous le menton, elle avait appris que c’était quelque chose de sérieux. Avec un froncement de sourcil elle détailla son visage et y lut ce qu’elle y redoutait : ils allaient devoir discuter de choses qui la concernaient d’un peu plus près que cette escapade en Ukraine.

SHERLOCK ―

« Au sujet de ce que nous allons faire ici et d'autres choses... »

Elle ne savait pas pourquoi, mais elle sentait que cette discussion n’allait pas totalement lui plaire. La demoiselle se contenta d’un léger hochement de tête, se dirigeant dans la pièce sans quitter Sherlock du regard. Elle n’avait pas besoin de regarder où elle allait, chaque détail de la chambre était imprimée dans son esprit au simple coup d’œil qu’elle avait posé dessus. C’était l’une des choses qu’elle faisait naturellement et qui pourtant avait tendance à marquer les gens. Bah. Il fallait un rien pour les choquer eux de toute façon.

HAYDEN ―

« ... Oui, bien sûr. » souffla-t-elle simplement, l’air intrigué.

Sherlock ayant réquisitionné le seul fauteuil de la pièce, elle alla s’asseoir au bout du lit, face au petit génie. Bah, elle n’avait pas peur de lui, même si elle n’était pas armée, elle avait déjà remarqué une demi-douzaine d’objets avec laquelle elle pouvait le tuer si jamais il décidait de faire sa forte tête. Et puis, ils étaient en Ukraine, elle aurait tout loisir de camoufler son meurtre. Mais d’un autre côté, elle se demandait s’il aurait accepté de faire ce voyage avec elle s’il était vraiment au courant que son grand dada dans la vie était de tuer des criminels ayant échappés à la justice. Ou alors, il était encore plus fêlé que John le laissait à penser. Et puis d’ailleurs, ce dernier ne serait pas tellement ravi si son meilleur ami la mettait sous les barreaux.

HAYDEN ―

« Je t’écoute. Qu’as-tu à me dire ? » dit-elle tout aussi calmement.

Cela promettait d’être intéressant... Elle se demanda brusquement si, quitte à le tuer, elle pourrait s’arranger pour le violer avant, histoire de pas faire de gaspillage. Après tout, elle ne serait pas à ça près.