[list][justify][i]Rikni serrait fortle bastingage de l'Orage Noir, essayant de sentir le vent, tout simplement, sans arrière-pensée. C'était difficile, extrèmement difficile,

que de faire la part des choses aujourd'hui... De simplement apprécier la mer, les environs, le ciel bleu, les embruns... Non, elle n'arrivait pas à se sortir de la tête que

le pont sur lequel elle posait les pieds était sur le point de céder, que la coque craquait, alors que le bois noirci semblait vouloir tomber en cendres au moindre impact.

La guerre avait été terrible, et le combat meurtrier : si le navire lui-même semblait sur le point de rendre l'âme, nombreux étaient ses camarades qui avaient passé

l'arme à gauche... Le capitaine, pour commencer, ce qui avait porté un coup dur à tout l'équipage. Rikni, morose, ne pouvait s'empêcher de faire le lien entre les

récents évènements et la mort de son mentor quelques années auparavant. Elle s'était senti aussi désespérée qu'en ce moment là, et pourtant était parvenue à

remonter la pente ; elle avait recommencé à travailler, s'était sentie utile et avait, sinon oublié, au moins tourné la page. Aujourd'hui, ils allaient tous tenter de sauver les

meubles. L'Orage Noir pouvait être réparé, et il fallait tout tenter pour maintenir à flot le bâtiment. Les dictons avaient beau proclamer haut et fort que la perte d'un

navire n'était que peu de chose face à l'esprit marin de l'équipage, c'était bien mieux de parvenir à garder le sien propre. Si l'équipage de l'Orage Noir ne navigait plus

sur l'Orage Noir, il avait un problème non ?
Rikni relâcha le bois, et fit quelques pas vers l'intérieur du pont. Ils se dirigeaient aujourd'hui vers un endroit qui serait ou le tombeau, ou la renaissance du bateau.

L'ambiance était tout de même glauque, ici ; on sentait bien que les pirates n'avaient guère le coeur à la fête. Et c'était bien compréhensible, bien que ça n'aide en rien

à la situation actuelle. Rikni fut presque tentée d'entrouvrir les lèvres pour chanter, mais sa voix n'était guère propice à pousser les autres à la suivre, bien qu'elle

connaisse quelques airs qui seraient fort à propos. Croyez-le ou non, elle a dans la tête d'autres morceaux que des chansons à boire. Marmottant pour elle-même des

notes un peu fausse, mais qui lui donnaient du coeur à l'ouvrage, elle fut soulagée de voir apparaître à l'horizon le but de leur voyage : l'Île d'En-Dessous. Enfin !

Quelques sourires naquirent sur les visages, ce qui mit du baume au coeur de la donzelle. Tout s'arrangerait, non ? C'était l'espoir intime de la cartographe, qui ne se

voyait pas voguer sur un autre navire que celui qui l'avait recueilli alors qu'elle n'était qu'une gamine perdue, mal à l'aise et qui manquait de confiance en elle. Cela

représentait tellement pour elle !
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