Tu appuyas sur le petit téléphone rouge de ton portable sans plus de cérémonie. Tu venais de mettre fin à une conversation relativement houleuse avec Cathleen, l'une de tes sœurs bien-aimées. Tu les adorais toutes, c'était un état de fait, mais Cathleen avait un don pour t'agacer rapidement et sûrement, tu ne savais pas d'où elle pouvait bien tirer un tel talent. Cette fois-ci, le sujet de conversation était à propos de Noël, fête dont tu te fichais éperdument... Bon, d'accord, il y avait bien ce dîner familial que tu attendais toujours avec impatience – avec tous tes frères et sœurs, ainsi que tes beaux-frères, tes belles-sœurs accompagnés par les neveux et les nièces, ce qui faisait au final un bon paquet d'invités. Mais à part ça, tu n'en avais rien à faire. Le sapin, les décorations, la neige... Tu n'étais pas contre tout cela, mais cela ne faisait pas de toi un fervent adepte de ces coutumes. Tu étais juste content que cette fête te serve de prétexte pour retrouver la fratrie au sein de laquelle tu avais évolué. Et ça, tout le monde le savait très bien.
Sauf que Cathleen en avait décidé autrement cette année. Elle voulait que tu viennes en avance pour aider aux préparatifs de la soirée. Sauf que tu te transformais en véritable danger quand tu rentrais dans une cuisine, donc il était tout simplement exclu que l'on te confie une quelconque tâche culinaire. Sauf que tu avais beau être grand, tu n'en restais pas moins quelqu'un de très maladroit, donc monter sur une chaise pour mettre l'étoile sur la plus haute branche du sympa te semblait assez... dangereux, autant pour toi que pour ton entourage. Sauf que tu n'aimais pas décorer les fenêtres, les meubles, même si c'était à l'occasion de Noël, donc il était hors de question que tu te forces. Et puis mince quoi ! Tu étais majeur et vacciné depuis longtemps, ta sœur n'a pas à te forcer à faire quoique ce soit.. ! Bon, d'accord, il serait tout de même plus convivial que tu essaies de mettre la main à la pâte, histoire d'essayer de contenter tout le monde... Mais tu ne parvenais pas à te faire à l'idée de décorer, mettre des guirlandes un peu partout... Ce n'était vraiment pas ta tasse de thé.

Soupirant, tu jetas négligemment ton téléphone sur la table de ta petite kitchenette. Tu sortis d'un pas distrait de la pièce, te retrouvant dans ton salon bien rangé. Tu regardas la petite horloge qui se trouvait juste au dessus de ta télévision. Trois heures moins le quart. Bien bien bien. Tu avais encore trois quart d'heure devant toi avant ton rendez-vous avec Joe. Joe était un jeune homme assez particulier, excentrique. Drogué et – selon le psychologue qui vivait en toi – un peu instable, il n'en restait pas moins quelqu'un d'agréable, trouvais-tu. Aussi avais-tu commencé à vouloir le fréquenter en dehors de vos heures de rendez-vous – car tu l'avais avant tout rencontré en tant que patient – et il n'était pas rare que tu lui demandes de te retrouver dans un petit café duquel tu étais devenu un client régulier. Un fin sourire étira alors tes lèvres. Tu avais donc le temps de te préparer, sans le moindre problème.

Tu passas alors dans ta chambre, ôtant ta chemise froissée pour en prendre une dite plus présentable. Tu la boutonnas soigneusement avant de te diriger vers l'unique commode qui faisait face à ton lit. Tu tiras le premier tiroir vers toi, et un air assez perplexe se peignit sur ton visage : tu étais comme qui dirait indécis face à tous ces nœuds papillons, tu ne savais lequel choisir... Avant de te rendre compte à quel point ta réflexion pouvais être ridicule. Le premier nœud papillon que tu attraperas sera le bon, un point c'est tout. Tes doigts se refermèrent sur un bout de tissus rouge. Parfait. Le rouge c'était cool. Et cette couleur allait parfaitement avec la teinte du costume marron/beige que tu avais prévu de porter aujourd'hui. Souriant, tu te rhabillas donc prestement, avant d'atterrir face au miroir de ta petite salle de bain. Tu passas rapidement une main parmi tes cheveux indomptables avant de te rincer le visage à l'eau fraîche, histoire de paraître plus réveillé que tu ne l'étais actuellement. En ce moment, tu passais beaucoup de temps au travail, mais pas assez à dormir malheureusement. Un petit soupir t'échappa : tu n'avais guère l'intention de te laisser abattre, que ce soit par la fatigue ou alors pas ta butée de sœur.
Tu t'extirpas de la salle de bain, quelques minutes plus tard, prêt à partir. Tu attrapas la veste que tu avais abandonné dans l'entrée, vérifias que tu avais bien tes clefs et tes papiers dans tes poches avant de fermer soigneusement la porte derrière toi.

Tu ne mis pas bien longtemps avant d'arriver à destination. Dix minutes de marche grand maximum... Et cette petite balade t'avait fait le plus grand bien, pour tout dire, cela t'avait aéré les neurones, tu avais laissé ta petite chamaillerie avec ta sœur dans ton appartement.
Un grand sourire fixé sur tes lèvres, tu entras à l'intérieur de ton café préféré. La serveuse te reconnut presque immédiatement, tu la saluas d'un bref mouvement de tête avant d'aller t'installer à une table au fond de la salle. Tu jetas un coup d'oeil à ta montre. Tu étais un peu en avance.

Bien. Il ne te restait plus qu'à attendre dans ce cas.