Greg Lestrade et Corey J. Berkeley

Je suis désolée. Mais sache que je t’ai sincèrement aimé Greg…
Greg ouvrit les yeux et afficha une expression douloureuse. Malgré tous ses efforts, il n’arrivait pas à effacer sa voix de sa tête. Pas plus que ce qui s’était passé quelques heures auparavant. Quelques heures… Il avait plutôt l’impression qu’une vie entière s’était écoulée.
Et pourtant tout semblait exactement comme avant. Les DVD et CD étaient toujours impeccablement rangé dans le meuble du salon, la cuisine était toujours aussi bien rangée, l’arme de service de Greg était toujours soigneusement posé, déchargée, sur le meuble dans l’entrée…Mais même si tout paraissait inchangé, quelque chose manquait : Roksana. Greg avait encore du mal à comprendre comment tout avait pu basculer en quelques heures.

Tout avait commencé quand il était rentré, tôt pour une fois, et avait trouvé Roksana dans le salon avec sa valise. Il n’avait pas compris et Roksana n’avait tout d’abord rien dis non plus, ne s’attendant surement pas à ce qu’il rentre aussi tôt. Après une minute que leur sembla interminable à se dévisager sans rien dire, ce fut finalement Greg qui reprit ses esprits le premier.

- Hmm, dit-il en se raclant la gorge, je peux savoir où tu vas ?

Roksana l’avait dévisagé quelques secondes avant de soupirer et de lui répondre, une expression triste dans le regard :

- Je pars Greg…

Le lieutenant n’avait pas eu besoin de plus de précisions pour comprendre qu’il fallait y entendre un départ définitif et donc une rupture. Ces trois mots pénétrèrent comme un coup de poignard dans son cœur, exception faîtes qu’ils lui firent plus mal qu’une centaine d’entre eux plantés dedans. Après deux années de bonheur, ça recommençait. Greg semblait condamné à ne jamais pouvoir trouver l’amour et à le garder. Heureusement, déformation professionnelle et (triste) habitude l’avaient doté d’un sang-froid parfait. Il était donc demeuré extérieurement calme et posé bien qu’il fût dévasté intérieurement.

- Je crois qu’on a tous les deux passé l’âge des scènes mélodramatiques de ruptures qu’on peut faire quand on est plus jeune. Je ne vais pas t’empêcher de partir ; mais…je voudrais juste savoir pourquoi avant que tu partes. Je pense que tu me dois bien ça non ?

Roksana avait hésité et sembler peser le pour et le contre un moment avant de finalement abandonner et poser sa valise.

- Tu as raison. Et comme je sais que je peux te faire totalement confiance, je vais tout t’expliquer.

Le DI n’avait pas compris ce qu’elle voulait dire par là. Depuis quand il fallait faire une confiance aveugle à quelqu’un pour lui expliquait pourquoi on rompait ? La jeune femme avait inspiré profondément avant de lâcher :

- Je ne suis pas la femme que tu penses Greg.
- Comment ça ?, avait répondu le lieutenant, suspicieux
- Je ne suis pas qu’une simple chorégraphe et danseuse… Je suis aussi une criminelle.

Greg n’avait pu retenir un petit rire nerveux

- Pardon ? Elle se fiche de moi ? Re…redis moi ça ?

- Je suis une cambrioleuse professionnelle Greg, avait répété la jeune femme le plus calmement du monde. Je vole des objets d’arts dans les plus grands musées du monde. Tu te souviens du Monnet à Orsay il y a 6 mois ? C’était moi. Quand je t’ai dit que je devais aller voir un chorégraphe en France.

Greg avait été trop choqué pour pouvoir répondre. Roksana, une criminelle ? Non, c’était impossible ! Il la connaissait, il…En fait plus il y réfléchissait plus il se disait qu’au bout de compte il était possible qu’il ne la connaisse pas aussi bien qu’il le croyait.

- Tu t’es servi de moi…, avait-il finalement réussi à articuler, la voix pleine d’amertume et de déception
- Non ! Non Greg, je t’ai sincèrement aimé, s’était-elle écriée en s’avançant vers lui. Je t’aime encore…, avait-elle-même rectifié.
- Alors pourquoi tu me dis tout ça maintenant ? Et pourquoi tu pars ?
- Parce que… j’ai pris trop de risques aujourd’hui. Je dois partir à l’étranger quelque temps, le temps que ça se tasse. Et je ne peux pas t’entraîner là-dedans.

Là, la logique de flic de Greg avait repris le dessus :

- Si tu as vraiment pris des risques au point de pouvoir te faire arrêter, je doute que ça se « tasse avec le temps ». Ils te retrouveront.

Roksana avait soupiré et levé les yeux au ciel.

- Eh bien qu’ils me retrouvent ! Ce sera un beau jeu du chat et de la souris.

Greg avait secoué la tête, décidant de ne pas insister. Tout ce qu’il pensait à ce moment-là c’est qu’il était content que son équipe ne s’occupe que des meurtres parce qu’il ne voulait pas être celui qui l’arrêterait. Roksana avait repris sa valise et était revenu vers lui.

- Je suis désolée. Mais sache que je t’ai sincèrement aimé Greg…, lui avait-elle dit en déposant un dernier baiser sur sa joue.

Puis elle était partie, laissant Greg seul dans l’appartement. Le lieutenant était resté quelques secondes interdit, comme hypnotisé, avant de finalement reprendre ses esprits.

Et c’est ainsi qu’il s’était retrouvé, allongé sur son canapé, dans le noir (il n’avait pas pris la peine d’allumer la lumière), les yeux rougis de larmes depuis longtemps sèches sur ses joues.
Greg regarda l’heure : 21h. Il se leva d’un air décidé, enfila son blouson et sortit de chez lui avant de prendre la direction de son bar préféré à Trafalgar Square. Une fois arrivé là-bas, il s’assit au comptoir et commanda une vodka. Il avait besoin d’un remontant. Et quelque chose de plus fort que de la bière…

Spoiler:

L'alcool, fort, presque pur mélangé dans à peine un peu de jus d'orange, coulait, chaud, dans sa gorge. Et, réaction totalement psychologique, en rien logique, mais humaine, il se sentait un peu mieux en buvant. Comme si quelques gorgées de ce liquide chaud coulant dans sa gorge pouvaient doucement effacer la scène qui s'était passée quelques heures plus tôt. Il entendit soudain quelqu’un l’interpeler à sa droite. Il n’avait même pas entendu la personne s’asseoir, trop absorbé par ses pensées aussi noires que le comptoir auquel il était assis. Il se retourna et fut plus que surpris, tombant nez à nez avec la dernière personne qu’il pensait voir ici. Corey... Il ne l’avait pas vu depuis des années.

Corey était le psychologue qui l’avait suivi suite à la mort d’Emily. Greg avait alors 26 ans et était jeune marié (ou plutôt jeune veuf suite à cette intervention). Il avait reçu une balle au flanc droit et plusieurs de ses collègues avaient reçues quelques blessures mineures et une fois sortis de l’hôpital, physiquement « rétablis » mais toujours en état de choc, ils avaient tous eu obligation d’aller voir le psychologue du Yard. Après tout ils avaient perdus un membre de leur équipe (et le suspect, un des collègues de Greg lui ayant tiré dessus, mais lui....). C’est ainsi que Greg s’était retrouvé dans le bureau de Corey. Il n’était pas particulièrement content d’y être. Pas du tout même. Il ne contestait pas l’ordre de ses supérieurs, il savait que c’était toujours la procédure dans des cas pareil, mais il ne voyait pas en quoi cela allait l’aider. Emily était morte. Elle ne reviendrait pas. Il avait perdu la femme qu’il aimait, sa femme, à tout jamais… Qu’est-ce qu’un psychologue, aussi bon soit-il, pouvait changer à ça ? Mais Corey l’avait compris. Il l’avait compris, avait fait avec, et avait tenté d’aider Greg en y allant progressivement, ne le brusquant pas, ne lui servant pas les phrases toutes faites si vide de réconfort qu’on dit dans ces cas là. Et petit à petit, effectivement Greg avait remonté la pente. Le chemin avait été long, douloureux (le lieutenant avait même tenté de se suicider, et aurait réussi, n’eut été la présence de sa sœur à ce moment là), mais il avait fini par sortir des ténèbres et reprendre doucement goût à la vie. Et il en avait été plus que reconnaissant à Corey. Au fur et à mesure de ses séances, il avait fini par l’apprécier et à le considérer un peu comme un ami. Et il trouvait ironique de retomber sur lui après toutes ces années, précisément après une autre déconvenue amoureuse, pas comparable à la première mais douloureuse quand même.

-Salut Corey…., répondit-il. Je cherche un peu de réconfort, poursuivit-il en désignant son verre. Parce que tu vois, ironie du sort, je ne t’ai pas vu depuis des années, et je tombe sur toi pile au moment où je me fais larguer…

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