Aujourd'hui avait été une rude journée. Enfin encore plus rude que les autres dans le sens où tu n'avais quasiment pas dormis la nuit dernière et que tu n'étais pas prête de te coucher ce soir. Tu avais sommeil, mais tu n'avais juste pas
envie de dormir maintenant. Tu n'étais même pas chez toi. Tu étais au milieu d'une pièce immense, emplie de gens. Les corps se serraient, se heurtaient, se frôlaient au rythme du son qui te crevait les tympans. La musique – si on pouvait appeler ça de la musique – te blessait les oreilles, te donnait une migraine pas possible et pourtant tu n'avais aucune envie de quitter les lieux. L'ambiance étourdissante, plus l'alcool et le peu de drogue que tu avais ingéré t'embrouillaient légèrement l'esprit, l'enveloppant dans un nuage d'étourdissement que tu trouvais fort agréable. Cependant, tu gardais le contrôle, tu n'avais pas envie de tout lâcher ce soir. Tu n'avais pas envie de te bourrer la gueule – il n'y avait pas d'autres mots – à ne plus pouvoir marcher seule, tu n'avais pas envie d'être malade le lendemain matin. Tu voulais juste te laisser aller un petit peu, dans cette ambiance que tu trouvais chaleureuse. Tu te mouvais comme les autres, suivant les différents rayons de lumière colorés qui parcouraient la pièce, posant un pied devant l'autre au rythme de la musique assourdissante.
Seulement, il y eût un moment où c'en fut trop, où tu n'avais plus envie de te dandiner comme ça, où tu avais juste eu l'impression de suffoquer. Tu t'étais rapidement arrêtée de danser, au grand désarroi de celui qui t'accompagnait et sans lui lancer un seul mot, un seul regard, tu tournas les talons pour aller chercher ta veste et ton sac à main. Tu enfilas ton vêtement, fouillas un moment dans ton sac pour en sortir un paquet de cigarettes acheté le matin même et pas encore entamé, puis sortis du bar en faisant signe au jeune homme de ne pas te suivre. The fuck. Tu ne le connaissais pas, tu venais juste de le rencontrer. Il n'était pas moche, tu devais bien l'avouer, mais ce n'était juste pas ton genre. Il était assez grand, bien musclé – de la gonflette très certainement – propre sur lui alors que toi tu préférais plutôt les bruns. That's all.
Tu allumas ta clope rapidement, dés que tu fus à l'extérieur. Tu restas un moment sans bouger, comme indécise, avant d'inhaler une grande goulée d'air pollué et de te mettre en marche dans une direction qui t'était absolument indifférente. Ce n'était pas le chemin pour rentrer chez toi, c'était juste une route imaginaire synonyme de balade nocturne.
Il ne faisait pas si froid que cela, contrairement à ce que tu aurais pu croire. Tout d'abord, il était assez tard, il n'aurait donc rien eu d'étonnant à ce que la température chute quelque peu. Puis, début mai approchait, amenant avec lui les temps relativement doux et les prémices du printemps que tu appréciais tant.
... Ouais. En fait cela n'avait rien d'étonnant, c'était juste toi qui avait le cerveau un peu détraqué. Ce qui te tira un sourire appréciateur. C'était là une véritable invitation à se promener. Invitation que tu ne pouvais absolument pas refuser. Mais vraiment pas. Tes jambes avaient besoin de se dégourdir un peu avant que tu n'aillais finalement dormir quelques heures. Fuck yeah, ça te semblait un bon programme.
Alors sans plus tarder, tu te mis en marche. Tu ne te pressais pas, tu prenais tout ton temps. Tu avais toute la nuit devant toi, tu n'avais aucun impératif le lendemain matin donc tout allait bien. Tu pouvais faire ce que tu voulais, quand tu voulais. Tu avais donc tout le temps que tu voulais pour profiter de ta petite promenade... ça c'était vraiment le pied. Tu jouissais d'une liberté quasi-totale... Tu ne faisais que ce qui te plaisait dans ta vie : après tout, tu étais encore jeune et tu avais toute la vie devant toi, alors tu comptais bien en profiter. Tes parents ne se faisaient aucun soucis pour toi – ils ne s'en étaient jamais fais d'ailleurs …– tes pseudos amis ne te dérangeaient pas plus que cela, ce qui te permettait de vivre ta vie comme tu l'entendais. À savoir, le soir, à dealer de la drogue dans les pubs et boîtes du coin. Ouiiii, boooon... Tu savais que ce n'était pas bien, que la drogue, c'est mal. Mais il fallait bien que tu te débrouilles pour pouvoir payer le loyer de ton appartement miteux et de quoi manger hein. Alors tu te débrouillais comme tu pouvais. Puis ce n'était pas vraiment de la drogue dure, juste un peu de chite hein... ça ne causait pas trop de bobos.
Un choc au niveau de ton épaule te tira soudainement de tes pensées. Tu reculas de quelques pas, un peu surprise. Quelqu'un venait de te rentrer dedans. Sans même lever la tête vers la personne qui avait osé commettre un tel acte, tu ouvris la bouche pour râler mais ton interlocuteur fut le plus rapide.
« Oh excusez-moi, je ne vous … il marqua une pause, avais pas vu ? »
Tu levas les yeux pour essayer de deviner ce qui avait fait hésiter ce qui semblait être un jeune homme, et là tu blêmis véritablement. Oh fuck de fuck, parmi tous les londoniens qui étaient dehors à cette heure-là, il avait fallut que tu tombes sur lui... Théodore Hermingway, connu au bataillon comme étant ton ex et dernier petit-ami en date. Tu avais rompu avec lui il y a de cela cinq ans, si tes souvenirs ne te trompaient pas, pour des motifs purement égoïstes, tu en avais bien conscience... Il venait de débuter sa carrière, et tu voulais juste le voir un peu plus souvent et pas seulement quand vous aviez tous les deux posé la tête sur l'oreiller. Sauf que ce n'était, pour lui, pas quelque chose de réalisable. Tu étais donc partie avec tes clics et tes clacs et lui avais claqué la porte au nez. Depuis, tu ne lui avais plus donné de nouvelles ni n'en avais reçu de sa part... Et quelque part, cela te convenait car cette histoire avec lui avait été refourguée dans la catégorie ''mauvais souvenir''.
« Oh... Salut. Tu reculas de quelques pas, faisant mine de t'en aller le plus rapidement possible. Désolée, j'ai pas fais exprès. »